Sourate 30 Ar-Rum

Ensuite, apparurent les Jacobins, les partisans de Jacob Al-Askâf, puis les Nestoriens, partisans de Nestorius. Le christianisme est donc formé [d'une multitude de sectes] comme l'a affirmée le Messager d'Allah (Salla Allah 'alayhi wa sallam) : " Ils se sont divisés en soixante douze sectes ".

Toujours est il que les Byzantins s'attachèrent au christianisme. Chaque fois qu'un empereur mourait, un autre lui succédait jusqu'au règne d'Héraclius, le dernier d'entre eux.

Héraclius était un homme sage qui voyait loin. Il était l'un des rois les plus rusés de l'histoire. Il fut un grand empereur et son règne fut glorieux et éclatant.

Cependant, le roi de la Perse et des régions avoisinantes : l'Iraq, le Khorason à l'est de la Perse, Rhagès au nord et l'ensemble des régions non arabes, s'opposa à lui. Le roi des Perses Chosroes s'appelait Sâbûr Dhu Al-Aktâf et son empire était plus vaste que celui d'Héraclius. Comme les Perses peuvent l'être, il était avide de pouvoir et stupide. Ces derniers professaient la religion mazdéenne et adoraient le feu.

D'après Ikrma, Chosroes envoya ses lieutenants et son armée pour combattre Héraclius. Mais, la plupart des historiens relatent que Chosroes dirigea lui-même l'armée qui attaqua Héraclius sur ses terres et lui infligea une cuisante défaite au point que seule Constantinople, où Héraclius trouva refuge, échappa à la domination perse.

Chosroes imposa un long et difficile siège à la cité qui résista. Héraclius était un roi vénéré de façon exagérée par les chrétiens.

En outre, Chosroes ne put conquérir Constantinople en raison de ses fortifications qui la rendaient imprenable. En effet, la moitié de la cité donnait sur la terre et l'autre moitié sur la mer par où elle était approvisionnée en denrées alimentaires et en armes.

Voyant le siège se prolonger, Héraclius pensa à une ruse afin de tromper Chosroes. Il proposa à ce dernier de lever le siège de sa cité et de faire la paix en échange de biens. En outre, Héraclius se déclarait prêt à accepter toutes ses conditions.

Chosroes accepta l'offre et exigea des richesses astronomiques qu'aucun roi de la terre n'aurait pu verser : or, bijoux, étoffes, vaisseaux, esclaves, hommes et femme et beaucoup d'autres types de biens.

Héraclius accepta les conditions de Chosroes en lui faisant croire qu'il disposait de tout ce qu'il demandait. Héraclius considéra Chosroes comme un homme doué de bien peu de raison pour avoir exigé de telles richesses dont, à eux deux, ils n'auraient pu réunir le dixième. Héraclius demanda à pouvoir se rendre au Cham et dans les autres régions de son empire, afin de prélever ce qui lui était demandé dans ses trésors cachés et ses réserves de nourriture. Chosroes lui laissa la voie libre.

Au moment de quitter Constantinople, Héraclius rassembla ses coreligionnaires et leur dit : " Je pars accomplir une mission avec quelques soldats de mon armée que j'ai choisis. Si je reviens avant qu'un an ne se soit écoulé, je serai toujours votre empereur, sinon, vous aurez le choix entre me maintenir votre allégeance ou vous choisir un autre roi ". Ils répondirent : " Tu seras notre roi tant que tu seras vivant, quand bien même tu t'absenterais dix ans ".

Héraclius quitta Constantinople au milieu d'un détachement de cavalerie de moyenne importance, alors que Chosroes campait à l'extérieur de la cité dans l'attente de son retour. Héraclius s'élança immédiatement vers la Perse qu'il mit à feu et à sang, tuant les uns après les autres tous les hommes en âge de combattre.

Il poursuivit sa campagne de destruction jusqu'à atteindre Madaïn, le siège de l'empire de Chosroes. Il y tua tous les hommes et s'empara des trésors et des réserves de nourriture. Il captura les femmes de la famille de Chosroes et rasa la tête de son fils avant de le faire monter sur le dos d'un âne et de l'envoyer, avec le reste des captifs, à son père dans un état d'humiliation extrême.

Puis, il écrivit un message à Chosroes dans lequel il lui disait : " Voici ce que tu as demandé, alors prends le ". Lorsque Chosroes fut informé des évènements, une affliction, dont seul Allah connaît la profondeur, s'empara de lui. Sa fureur se déchaîna contre Constantinople autour de laquelle il resserra son étau par tous les moyens dont il disposait, mais en pure perte.

Incapable d'obtenir la reddition de la ville, il décida de couper la route à Héraclius au niveau du gué du fleuve Jayhun, le seul passage que pouvait emprunter Héraclius pour regagner Constantinople.

Informé, ce dernier employa une ruse sans précédent dans l'histoire. Il disposa ses troupes et ses trésors à proximité du gué, tandis qu'accompagné d'une partie de ses hommes et de bêtes chargées de paille et de crottins, il remonta le fleuve près d'une journée entière.

Il ordonna alors que les charges de paille et de crottins soient jetées dans le fleuve. Lorsque la paille et les crottes emportées par les eaux du fleuve passèrent devant Chosroes et son armée, ceux-ci crurent que leurs ennemis avaient traversé le fleuve en amont.

Les Perses marchèrent à leur poursuite laissant donc le gué libre.

De retour au gué, Héraclius ordonna à ses hommes de se lever et de traverser le fleuve à gué. Puis, progressant rapidement, ils purent échapper à Chosroes et ses troupes et entrer dans Constantinople.

Ce fut un grand jour pour les chrétiens. Chosroes et ses armées furent en plein désarroi, ne sachant que faire. Ils n'avaient pu conquérir la cité d'Héraclius, et leur propre pays avait été dévasté par les Byzantins qui s'étaient emparés de leurs trésors et avait capturé leurs femmes et leurs enfants.

C'est ainsi que les Byzantins ont vaincu les Perses, et ce, neuf ans après la victoire des Perses sur les Byzantins. La confrontation entre les armées byzantines et perses eut lieu dans une région située entre Adhru'ât et Busrâ, selon entre autres, Ibn Abbâs et Ikrima, et se solda par la victoire des Byzantins.

L'endroit se trouve aux confins du Cham, avant de pénétrer dans le Hijâz.

Mujâhid pour sa part, affirme que la bataille eut lieu en Mésopotamie qui est la région du royaume byzantin le plus proche de la Perse. Mais Allah en est mieux informé que quiconque.

Selon un grand nombre d'exégètes, dont Ibn Abbâs, Ath-Thawri et As-Suddi, la victoire des Byzantins sur les Perses eut lieu le jour de la bataille de Badr.

Source : Tafsîr d'Ibn Kathîr