Al-Bidâya Wa An-Nihâya Ibn Kathîr

Les différents courants divergèrent sur ce hadith. Certains Qadarite [Qadariya] le rejetèrent du fait qu'il confirme la prédestinée. Des Jabrites [Jabariya] le prirent comme argument, car il est à leur regard évident, étant donné qu'il dit : " Et Adam triompha de Moïse ", Adam ayant invoqué le fait qu'Allah l'avait écrit d'avance. Nous répondrons plus loin à cela.

D'autres ont affirmé : Adam a réfuté Moîse, car il l'a blâmé à cause d'un péché dont il s'était repenti, or celui qui se repent d'une faute est comme s'il ne l'avait jamais commis.

On a dit aussi : Il l'a emporté sur Moïse, parce qu'il était plus vieux et plus ancien que lui ou parce qu'il était son père ou encore parce la Loi de l'un est différente de celle de l'autre ou enfin parce qu'ils se trouvaient dans le monde de l'intervalle [barzakh] où l'on n'est plus responsable légalement.

Ce qui est certain, c'est que ce hadith a été rapporté avec des formulations variées, certaines ayant relaté le sens du hadith, mais elles sont discutables. La plupart des termes sont contenus dans Sahîh Al-Bukhâri et Muslim, et dans d'autres ouvrages.

Moïse lui ayant reproché d'avoir causé sa propre sortie et celle de sa descendance du Paradis, Adam lui répondit : " Ce n'est pas moi qui vous ai fait sortir du Paradis, mais Celui qui a fait de ma consommation du fruit de l'arbre la cause de cela. Il a décrété une telle chose et l'a écrite avant que je sois créé, il s'agit d'Allah (Exalté soit-Il). Tu me blâmes pour une chose dont je ne suis responsable que parce que j'ai commis ce qui m'avait été interdit, à savoir manger de l'arbre. Le fait que mon exclusion soit la conséquence de ma violation de l'ordre d'Allah ne peut m'être imputé. Je ne vous ai donc pas sortis ni moi-même du Paradis, mais ce fut de par le décret et l'oeuvre d'Allah que cela s'est produit ; et Il agit ainsi pour une sagesse précise ". C'est ainsi qu'Adam réfuta Moïse [Moussa].

Quant à celui qui dément ce hadith, il s'obstine dans l'erreur, car il est attribué à Abû Hurayra (qu'Allah l'agrée) connu pour sa justesse, sa mémoire, et son intégrité, par de nombreuses chaînes de narrations. Il est, en outre, rapporté par différents compagnons.

Quant à ceux qui l'interprètent des manières que nous avons citées ci-dessus, ils sont loin du sens propre ou figuré, bien qu'il y ait parmi eux des gens plus justes que les Jabrites. C'est que leurs propos restent discutables sous différents aspects :

• 1) Moïse ne peut blâmer quelqu'un pour un péché dont il s'est repenti.

• 2) Il a tué une âme sans en avoir reçu l'ordre, il a pour cela, imploré Allah en ces termes : " Seigneur, dit-il, j'ai commis une injustice envers moi-même, pardonne moi. Et Allah lui pardonna " (Coran 28:16).

• 3) Si chaque fois qu'il est réprimandé pour un péché, le serviteur invoquait le destin écrit à l'avance, ce serait une échappatoire à tous ceux qui sont blâmés d'avoir commis une faute. On prendrait comme argument le fait que cela fut prédestiné, et on fermerait ainsi l'accès à l'application de la peine du talion et aux autres sanctions légales, et si le destin était en soi un motif, chacun s'y appuierait pour justifier ses actes, les grands comme les petits. Or une telle chose conduirait à des conséquences très fâcheuse. C'est pour cette raison que certains savants ont suggéré que la réponse d'Adam fut une explication du malheur l'ayant frappé et non une justification du péché commis, et Allah sait mieux.

Une certaine catégorie de gens ont dit : Il s'agit de celui, c'est à dire le Prophète Idrîs ('alayhi salam) mentionné dans le hadith de Mu'âwiya Ibn Al-Hakam As-Sulamî, lorsqu'il interrogea le Messager d'Allah (Salla Allahu 'alayhi wa sallam) sur la géomancie. Le Prophète (Salla Allahu 'alayhi wa sallam) lui répondit :

" Il y avait un prophète qui pratiquait la géomancie. Quiconque s'accorde dans ce qu'il fait avec la pratique de ce prophète, fait ce qu'il faut ".

(Rapporté par Muslim)

De nombreux spécialistes de l'exégèse et de la jurisprudence prétendent que le premier à pratiquer cela fut un certain Harmas Al-Harâmisa.

Ibn Hazm et d'autres soutiennent la prophétie de deux femmes : Sarah, la mère de Moïse et Marie. Leur preuve est que les anges s'adressèrent à elles et qu'une révélation fut faite à la mère de Moïse. Mais la majorité, comme l'a relaté Abû Al-Hasan Al-Acharî et d'autres parmi les gens de la Sunna et du Consensus, disent que la prophétie est réservée aux hommes et qu'il n'y a aucune femme prophétesse.

Source : Al-Bidaya Wa An-Nihaya de Ibn Kathîr p.37-40