Se Convertir à l'Islam

Abd Allah Ibn Abbâs (qu'Allah l'agrée) rapporte :

" Il me tenait à coeur de m'enquérir auprès de Umar Ibn Al-Khattâb (qu'Allah l'agrée) des deux épouses du Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) au sujet desquelles fut révélé le verset :

" Si toutes deux vous revenez repentantes à Allah, c'est que vos coeurs cèdent à la raison. Mais si au contraire, vous vous liguez contre le Prophète, sachez qu'Allah est son Protecteur et qu'il bénéficie [en outre] du soutien de Jibrîl, des croyants les plus vertueux et des anges ".

(Coran 66:4)

L'occasion se présenta quand ensemble nous accomplîmes le Hajj. Il s'écarta du chemin et je m'écartai avec lui, emportant une outre. Il alla déféquer, puis quand il revint, je lui versai de l'eau pour se laver les mains. Quand il eut fait ses ablutions, je lui demandai : " Ô Commandeur des Croyants ! Quelles sont les deux femmes parmi les épouses du Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) au sujet desquelles fut révélé le verset : " Si toutes deux vous revenez repentantes à Allah ". Il répondit : " Tu m'étonnes ô Ibn Abbâs, il s'agit de Aïcha et Hafsa ".

Puis il poursuivit son récit : " J'habitais à l'époque dans les faubourgs de Médine et avais pour voisin un médinois du clan des Banû Umayya Ibn Zayd qui comptaient parmi les noble de la cité. Tous les jours, l'un de nous deux, à tour de rôle, se rendait auprès du Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) et rapportait à l'autre les dernières nouvelles de la Révélation et des évènements advenus.

Dans nos foyers, nous avions, nous autres Quraychites, le pas sur nos femmes, contrairement aux Ansâr, beaucoup plus aimables avec leurs compagnes. Lorsque nous nous fûmes établis à Médine, nos femmes furent réceptives aux moeurs locales. Or, un jour, comme j'admonestais ma femme, elle me donna la réplique. Voyant que j'en étais outré, elle me dit : " Pourquoi tu t'en formalises ainsi ? Par Allah, les femmes du Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) lui donnent bien la réplique, et vont même jusqu'à refuser de lui adresser la parole toute une journée durant ". Choqué, je lui répondis : " Elles ont l'audace de faire cela ? Malheur à celle d'entre elles qui ose le faire ".

Puis, n'en pouvant plus, je m'habillai et allai trouver Hafsa [ma fille et épouse du Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam)] à qui je demandai : " Ô Hafsa ! Est-il vrai qu'il vous arrive, vous les épouses du Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam), de refuser de lui adresser la parole toute une journée durant ? " Comme elle répondit par l'affirmative, je lui dis : " Malheur à toi alors. Penses-tu être à l'abri de la colère d'Allah en provoquant celle de Son Prophète ? Abstiens-toi donc d'être trop exigeante avec le Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam), de lui donner la moindre réplique et de refuser de lui adresser la parole. Tout ce dont tu peux avoir besoin, demande-le à moi, et surtout ne te laisse pas induire en erreur car ta coépouse [c'est à dire Aïcha] est plus belle que toi et plus chère au coeur du Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) ".

Puis Umar d'ajouter : " Des rumeurs circulaient alors, selon lesquelles les Banû Ghassân se préparaient à nous attaquer. Comme c'était au tour de mon voisin d'aller aux nouvelles auprès du Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam), il vint à son retour au soir frapper à ma porte si fort que je me sentis épouvanté en allant lui ouvrir.

Il me dit alors : " Il est advenu aujourd'hui une chose bien grave ". Je demandai : " Quoi donc ? les Banû Ghassân auraient-ils attaqué ? " Il répondit : " Pire que cela. Le Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) a répudié ses femmes ". Dans une autre version Abd Allah Ibn Hunayn entendit Ibn Abbâs rapporter d'après Umar, que : " Le Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) s'est mis à l'écart de ses femmes ". Je m'écriai " Malheur donc à Hafsa ". J'en avais eu en effet le pressentiment.

Je m'habillai à la hâte et me rendis auprès du Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) en compagnie duquel j'accomplis la prière de l'aube subh. Quand nous eûmes fini, le Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) retourna dans la chambre supérieure.

J'allai avoir voir Hafsa, que je trouvai en larmes. " Pourquoi pleures-tu ? Ne t'avais-je pas avertie ? Le Prophète vous a donc répudiées ? " Elle répondit : "Je n'en sais rien. Il s'est mis à l'écart comme tu vois". Je ressortis pour trouver un groupe de gens assis autour du minbar, dont certains étaient en pleurs.

Je m'assis avec eux mais, ne tenant plus en place, je me rendis devant la pièce où le Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) s'était cloîtré, et demandai à un esclave noir qui se tenait à sa porte de me faire admettre. Il entra puis ressortit pour me dire : " Je t'ai annoncé au Prophète mais il est resté silencieux ". Je m'en retournai alors m'asseoir avec les gens autour du minbar, mais ne pouvant plus me retenir, je me levai et allai à nouveau demander à l'esclave de me faire admettre. Il entra et revint à nouveau me dire que le Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) n'avait rien dit en entendant prononcer mon nom. Je revins encore une fois m'asseoir, mais n'en pouvant plus à nouveau, je me levai et allai retrouver l'esclave. Il entra et ressortit pour me répéter la même chose.

Je retournai, mais je m'entendis aussitôt appeler par le noir qui me dit que le Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) m'autorisait à entrer auprès de lui. J'entrai alors, et le vis qui se tenait allongé sur une natte sans couverture, la flanc couvert de marques laissées par sa natte, s'accoudant à un oreiller dur garni de fibres d'osier. Je le saluai puis demandai en restant debout : " Ô Envoyé d'Allah ! As-tu répudié tes femmes ? " Levant les yeux vers moi, il répondit : " Non ".

Je louai Allah, puis ajoutai, tout en restant debout : " Ô Envoyé d'Allah ! Si tu nous voyais dans nos foyers, nous les Quraychites qui avions l'habitude d'être obéis de nos femmes, et en arrivant ici nous nous sommes retrouvés au milieu de gens courtois avec les leurs ".

Comme je le vis sourire, j'ajoutai :  Ô Envoyé d'Allah ! Si tu me voyais dire à Hafsa : " Ne te laisse pas induire en erreur, car ta voisine [c'est à dire Aïcha] est plus que toi et plus chère au coeur du Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) ".

Comme je le vis sourire à nouveau, je m'assis auprès de lui. Levant alors les yeux, je jetai un regard autour de moi, remarquant que la chambre était nue à l'exception de trois peaux tannées jetées par là. Me tournant alors vers lui, je lui dis : " Ô Envoyé d'Allah ! Ne prierais-tu Allah qu'Il couvre de Ses largesses ta communauté. Persans et Byzantins ne vivent-ils pas dans le faste et l'opulence, alors qu'ils n'adorent même pas Allah ". Le Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) se redressa et me dit : " Est-ce ta préoccupation ô Ibn Al-Khattâb ? Ces gens là jouissent par anticipation des grâces divines ". Je lui demandai alors d'implorer pour moi le pardon d'Allah.

La retraite du Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) dura 29 nuits, à cause de l'indiscrétion dont Hafsa avait fait preuve en révélant à Aïcha la confidence que l'illustre époux (Salla allahu 'alayhi wa salam)lui avait faite. Pour les punir, il s'engagea à ne pas entrer chez elles un mois durant. Cela allait lui valoir des observations de la part d'Allah (1).

Puis, les 29 nuits écoulée, il regagna l'appartement de Aïcha. Celle-ci lui dit : " Ô Envoyé d'Allah ! Ne t'étais-tu pas engagé à te mettre en retraite tout un mois (2). Seulement 29 jours se sont jusqu'ici écoulés ".  Il lui répondit : " Un mois peut ne compter que 29 jours ".

La lunaison allait lui donner raison. Aïcha ajouta : " Comment Allah avait révélé le verset qui laisse à l'époux le choix des nuits à accorder à l'épouse, le Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam) vint me voir en premier et me fit savoir que je pouvais choisir de rester ou de m'en aller. Je choisis de rester, de même que toutes ses autres épouses ".

(Rapporté par Bukhâri 5191)

(1) Ce reproche est exprimé dans le verset 1 de la sourate At-Tahrîm : " Ô Prophète ! Pourquoi tu t'interdis, pour complaire à tes épouses, ce qu'Allah a décrété licite pour toi ? ". Quant à la confidence, elle aurait été l'annonce faite à Hafsa de l'accession de Umar après, qu'Abû Bakr à la succession du Prophète (Salla allahu 'alayhi wa salam). Hafsa en informa Aïcha.

(2) Le verset du choix des nuits est : " Il ne te sera pas reproché de faire attendre, parmi tes épouses, celles que tu voudras, ou d'en reprendre une que tu avais écartée auparavant " (Coran 33:51).