L'Ethique du Musulman - M. Al-Ghazali

Le maître de maison se doit de connaître les demandes raisonnables de sa femme et de ses enfants et de dépenser généreusement pour les satisfaire. Car la religion ne pousse nullement l'individu à abandonner son épouse ou ses enfants dans un état inquiétant de besoin et de gène en consacrant ses dépenses à d'autres domaines, quelle que soit leur gravité. Car les liens familiaux méritent, plus que tout autre domaine, de recevoir les soins nécessaires.

L'Envoyé d'Allah ﷺ a dit :

" Du dinar que tu dépenses dans le chemin d'Allah, du dinar que tu dépenses en faveur d'un autre individu et du dinar que tu fais en aumône à ta famille, celui des trois qui te rapporte la plus grande rétribution est celui que tu dépenses en faveur de ta famille ".

(Rapporté par Muslim)

Nous avons déjà rapporté, dans le chapitre sur la sincérité, la parole du Prophète ﷺ :

" Lorsque le musulman fait une dépense en faveur de sa famille en considérant qu'il fait un sacrifice pour Allah, cette dépense comptera pour lui comme une aumône ".

(Rapporté par Bukhâri)

Par cette bonne initiation, l'Islam veut ordonner les dépenses légitimes selon un ordre utile et profitable. Car la famille est la base de la grande société et la cellule vivante qui génère son immense édifice. Aussi, s'en occuper en premier lieu est plus profitable pour toute la communauté que de la priver et de la brimer.

En plus, cette initiation renferme une remontrance pour une catégorie d'individus qui ont tendance à dilapider leurs biens hors de leur maison, en compagnie de leurs amis ou de personnes étrangères à la famille. Quand ils se retrouvent avec les membres de leurs familles, ils donnent le mauvais exemple par leur parcimonie et leur dureté.

Les proches du musulman méritent plus que les autres de bénéficier des surplus de ses biens et ils ont le droit de recevoir ses dons généreux. C'est d'ailleurs une simple question de bon sens. Car, si un homme a un proche dans le besoin, qu'il le délaisse et cherche à réaliser le bien en passant par dessus lui, son geste n'a aucun sens. Ce genre d'attitude risque même de semer le ressentiment dans le cœur des déshérités et de leur faire sentir qu'il s'agit d'une négligence délibérée à leur égard, qui cherche à les vexer et à les mépriser. Et s'il s'avère que le donateur vise par son don à vexer ses proches, son aumône ne sera pas acceptée et elle deviendra même une source de malheur pour lui. Il est dit dans le hadith :

" Ô communauté de Muhammad ! Par Celui qui m'a envoyé avec la Vérité ! Allah n'accepte pas l'aumône d'un homme qui a des proches dans le besoin, qui dépense son aumône en faveur d'autrui ! Par Celui qui détient le sort de mon âme ! Allah ne le regardera pas au Jour de la Résurrection ".

(Rapporté par Tabarânî)

Zaynab Ath-Thaqiffiya, la femme de Abd Allah Ibn Mas'ûd (qu'Allah soit satisfait d'eux) rapporte ceci :

" L'Envoyé d'Allah ﷺ nous ayant dit : Ô vous les femmes ! Faites l'aumône même en donnant de votre parure ! Je suis rentrée voir Abd Allah Ibn Mas'ûd et je lui ai dit : Tu es un homme qui n'a pas beaucoup de biens. Or l'Envoyé d'Allah nous a ordonné de faire l'aumône. Va l'interroger à ce sujet : Si ta situation me permet de te donner l'aumône, sinon je la donnerai à d'autres. Abd Allah Ibn Mas'ûd a répondu :  Va plutôt l'interroger toi-même. J'y suis donc allée et j'ai rencontré en cours de route une femme des Ansâr qui voulait faire la même chose. Comme l'Envoyé d'Allah ﷺ a reçu une majesté [qui nous empêche de le voir] Bilâl vint à notre rencontre. Je lui ai dit : Va dire à l'Envoyé d'Allah qu'il y a à la porte deux femmes qui te demandent ceci : L'aumône qu'elles doivent faire peut-elle être donnée en faveur de leurs époux et d'orphelins à leur charge ? Mais ne lui dit pas qui nous sommes. Bilâl rentra chez l'Envoyé d'Allah et l'interrogea. L'Envoyé d'Allah ﷺ lui demanda : Qui sont-elle ? Bilâl dit : C'est une femme des Ansâr et Zaynab. L'Envoyé d'Allah ﷺ lui dit : Quelle Zaynab ? Bilâl dit : L'épouse de Abd Allah Ibn Mas'ûd. Il lui dit : Elles auront la rétribution de la parenté et celle de l'aumône ".

(Rapporté par Bukhâri)

L'Envoyé d'Allah ﷺ a dit également :

" L'aumône en faveur du nécessiteux compte pour une aumône et en faveur du proche parent pour deux : Une aumône et un entretien du lien de parenté ".

(Rapporté par Tirmidhî)