Le Juste Milieu dans la Da'wa

L'EQUITE (suite)

Dans l'une de ses recommandations aux armées musulmanes, Abû Bakr (qu'Allah lui fasse miséricorde) dit à Yazîd Ibn Abî Sufyân : " Tu rencontreras des gens qui affirmeront qu'ils se sont consacrés à Allah. Epargne les tant qu'ils prétendront qu'ils se vouent à Lui ".

Un jour, Umar Ibn Abd Al Azîz (qu'Allah l'agrée) ordonna à son héraut d'annoncer : " Que se présente à moi celui qui a subi une injustice ! "

Un non-musulman [dhimmî] de Homs [en Syrie] se leva et déclara : " Ô Commandeur des Croyants ! Je te demande d'appliquer le Livre d'Allah !

De quoi s'agit-il ? s'enquit Umar.

L'homme expliqua : " Al Abbâs Ibn Al Walîd Ibn Abd Al Mâlik a usurpé mon terrain ".

Umar interrogea Al Abbâs qui était alors assis dans l'assemblée : " Que reponds-tu ô Abbâs ?

Celui-ci acquiesça : " Effectivement, Commandeur des Croyants, Al Walîd me l'a attribué et a consigné ce don dans un registre ".

Umar interrogea : " Que dis-tu ô dhimmi ? "

L'homme répliqua : " Ô Commandeur des Croyants ! Je te demande d'appliquer le Livre d'Allah le Très Haut ! "

Umar ajouta : " Oui, le Livre d'Allah mérite plus d'être suivi que le registre d'Al Walîd. Restitue-lui sa propriété ! "

Al Abbâs se plia à cette injonction.

Le vécu des non-musulmans, dès l'avènement de l'Islam jusqu'à ce jour, atteste qu'ils n'ont pas été contraints d'adopter l'Islam comme religion. A tel point que le musulman qui épouse une non-musulmane ne doit pas obliger celle-ci à devenir musulmane. Elle a le droit de conserver sa religion et ses droits doivent être respectés. Ce comportement équitable est attesté par les adversaires de l'Islam.

Sir Thomas Walker Arnold déclare :

" Mais des tentatives organisées pour forcer les non-musulmans à accepter l'Islam ou d'une persécution systématique visant à détruire le Christianisme, nous n'entendons rien ". 

- Fin de citation -

A l'heure actuelle, de nombreuses sectes chrétiennes vivent au Shâm, en Egypte ou au Maghreb et sont témoins de l'équité de l'Islam.

Thomas Walker Arnold ajoute :

" Les Arabes chrétiens qui à notre époque vivent au sein des sociétés musulmanes attestent de cette tolérance. Dans les pays musulmans, ils jouissaient des mêmes droits que les musulmans, avec la garantie que leur vie et leurs biens étaient en sécurité. Ils profitaient de cette tolérance qui leur procurait la liberté de conscience et leur laissait le champ libre dans le domaine de la création et de la pensée ".

- Fin de citation -

Gustave Lebon déclare :

" En vérité, les nations n'ont pas connu de conquérants aussi compatissants et tolérants que les Arabes, ni de religion aussi indulgente que la leur ".

- Fin de citation -

Gustave Lebon aborde les aspects du comportement des musulmans envers les non-musulmans en soulignant :

" Mis à part leur tolérance, les Arabes d'Espagne se caractérisaient par l'esprit idéal de chevalerie. Ils étaient compatissants envers les faibles, courtois avec les vaincus et respectueux de leurs engagements. Il convient d'y ajouter les autres qualités que les nations chrétiennes d'Europe leur ont empruntés récemment ".

- Fin de citation -

Tout ce qui précède illustre la grandeur de cette religion et son équité dans la façon dont elle traite et invite les non-musulmans.

Nul ne l'ignore si ce n'est celui qui méconnaît la réalité de l'Islam. Voire, une simple réflexion, de la part de celui qui cherche la vérité et s'efforce de l'atteindre, suffit pour la faire apparaître.

L'équité dans la prédication fait partie de la perfection de cette religion. De même qu'on ne contraint personne à y adhérer, de même on ne laisse personne sans lui présenter l'Islam, soit par la parole soit par le comportement et la conduite.

Dans sa vision de la modération, l'Islam prévoit que les non-musulmans demeurent parmi les musulmans, avec la garantie expresse qu'ils pratiqueront leur religion en toute sécurité.

Ce bon comportement fut d'ailleurs, à l'origine de la conversion de nombre de gens à l'Islam, à travers l'histoire. Il s'agit là d'un témoignage vivant de la modération et de l'équité de cette religion dans la prédication. Les arguments et les preuves de l'Islam démontrent au non-musulman la réalité de sa présence dans la vie.

La nécessité de l'équité dans la prédication se manifeste à travers la parole du Très Haut :

" Et quand vous parlez, soyez équitables ".

(Coran 6:152)

Elle n'est pas indépendante de la généralité du verset qui exhorte :

" D'avoir de bonnes paroles avec les gens ".

(Coran 2:83)

Il s'avère par conséquent, que les paroles bonnes et équitables constituent un principe de base dans l'appel à Allah.

En effet, la pratique du Prophète (sallallahu 'alayhi wa sallam) consistait toujours à s'adresser à ses contradicteurs avec douceur, afin d'attirer leur sympathie. Cette équité du Prophète (sallallahu 'alayhi wa sallam) dans son échange avec les non-musulmans se révèle aussi dans les lettres qu'il leur a envoyés. Celles-ci renfermaient l'invitation à l'Islam dans le plus doux des styles et la plus éloquente des expressions.

Une façon de parler de manière équitable avec les non-musulmans consiste à ne pas exagérer en faisant des invocations contre eux.

Bien au contraire, le Prophète (sallallahu 'alayhi wa sallam) invoquait Allah pour eux.

Un exemple de cette éminente attitude prophétique envers ses contradicteurs a trait au récit d'Al Tufayl Ibn Amr Al Dawsî (qu'Allah l'agrée). Quand celui-ci se présenta au Prophète (sallallahu 'alayhi wa sallam), les Compagnons s'écrièrent :

" Ô Messager d'Allah ! La tribu de Daws a mécru et a refusé de se soumettre. Invoque donc Allah contre elle ! "

Quelqu'un déclara : " Daws a péri ! "

Cette personne pensait que le Prophète (sallallahu 'alayhi wa sallam) avait levé les mains pour invoquer effectivement contre la tribu. Mais en réalité il dit : " Ô Allah ! Guide les Daws et faits les venir ! "

(Rapporté par Mouslim)

De même le Prophète (sallallahu 'alayhi wa sallam) fit des invocations pour la mère d'Abû Hurayra (qu'Allah lui fasse miséricorde) avant qu'elle n'embrasse l'Islam.

Moulim rapporte d'après Abû Hurayra : " J'invitais ma mère, qui était encore polythéiste, à adhérer à l'Islam. Un jour, je lui en fis la proposition, mais elle tint des propos odieux à l'encontre du Messager d'Allah (sallallahu 'alayhi wa sallam). Je me rendis en pleurs, chez l'Envoyé d'Allah (sallallahu 'alayhi wa sallam). Je dis :

" Ô Messager d'Allah ! J'ai invité ma mère à l'Islam à plusieurs reprises, mais elle a toujours refusé. Aujourd'hui, j'ai renouvelé mon invitation, mais elle a tenu à ton encontre, des propos inacceptables. Demande donc à Allah de guider la mère d'Abû Hurayra ".

Le Messager d'Allah (sallallahu 'alayhi wa sallam) invoqua aussitôt : " Ô Allah ! Guide la mère d'Abû Hurayra ! "

Je m'en allai tout réjoui par l'invocation du Prophète d'Allah (sallallahu 'alayhi wa sallam). Quand j'arrivai chez moi, je trouvai la porte close. En reconnaissant le bruit de mes pas, ma mère cria : " Reste où tu es, ô Abû Hurayra ! " J'entendis le bruit de l'eau à l'intérieur. Elle fit ses grandes ablutions, enfila sa tunique et s'empara rapidement de son voile, avant de m'ouvrir. Elle dit : " Ô Abû Hurayra ! J'atteste qu'il n'y a aucun dieu si ce n'est Allah et j'atteste que Muhammad est le serviteur et le Messager d'Allah ".

Je retournai chez le Messager d'Allah (sallallahu 'alayhi wa sallam) pleurant de joie ".

(Rapporté par Mouslim)

Un autre exemple d'invocation du Prophète (sallallahu 'alayhi wa sallam) est en rapport par les juifs. En effet, ceux-ci s'efforçaient d'éternuer en sa présence afin qu'il leur dise :

" Qu'Allah vous fasse miséricorde ! "

Il ne manqua pas d'invoquer Allah pour qu'Il guide et les réforme. Il disait : " Qu'Allah vous guide et améliore votre condition ! "

(Al Adab Al Mufrad, Al Boukhâri et authentifié par Albanî)

Invoquer pour les non-musulmans, selon les règles de la Loi, afin qu'Allah les guide, relève de l'équité de l'Islam envers eux.

Cette bienfaisance à leur égard est l'une des plus grandes formes de tolérance en Islam. Elle constitue aussi l'une de ses plus belles qualités, car elle porte sur l'être humain un regard de dignité et de sollicitude.

L'invocation pour sa part, représente un moyen apparent de se concilier le coeur des gens. En effet, chacun attend de la part d'autrui de bonnes invocations. D'où la déclaration d'Ibn Abbâs (qu'Allah l'agrée) :

" Si Pharaon me disait : " Qu'Allah te bénisse ! " Je lui répondais : " Et toi également ! " Pharaon était déjà mort depuis fort longtemps.

(Al Adab Al Mufrad, Al Boukhâri et authentifié par Albanî)