Contes divers

Sâlih Al-Marrî a raconté :

" Une nuit de vendredi, j'étais dans un cimetière, et je me suis endormi entre les tombes. Voilà que durant mon sommeil, je vis comme si toutes les tombes s'étaient ouvertes : les morts en sortaient et s'asseyaient en cercles.

Des plats couverts leur étaient présentés ; parmi eux, j'apercevais un jeune qui était le seul à être châtié par différentes sortes de punitions !

Je m'avançais vers lui et lui demandais pourquoi il était le seul de tout le groupe à endurer cela.

Il me répondit : " Ô Sâlih ! Par Allah ! J'ai un service à te demander, fais parvenir cette commission, et aie pitié de ma solitude ; peut-être Allah fera t-Il en sorte que, par ton aide, je trouve une issue à mon problème. J'ai une mère qui, depuis ma mort, réunit chaque jour les pleureuses pour se lamenter de ma disparition ; et je suis châtié à cause de cela : le feu est à ma droite, à ma gauche et devant moi, et tout cela à cause du mauvais comportement de ma mère ! Je prie Allah qu'Il ne la récompense pas en bien, pour ce qu'elle me faisait endurer ! "

Puis le jeune homme pleurait jusqu'à ce que je fusse attristé pour lui, et pleura à mon tour.

Puis le jeune homme me demandait d'aller voir sa mère, en m'indiquant l'endroit et le lieu, et de dire ceci à sa mère : " Ô mère ! Pourquoi châties-tu ton fils ?! Tu m'as élevé quand j'étais petit, et m'as préservé des maux, mais quand je suis mort, dans le châtiment, tu m'as jetée ! Ô mère ! Si tu me voyais, les chaînes au cou et aux pieds, et les Anges enlever ! Si tu voyais mon infortune, tu aurais pitié de moi ! Si tu ne mets pas fin à ton deuil et à ce que tu fais, je demanderai à Allah de me venger de toi, le Jour où le ciel se fondra sur un autre ciel, et que toutes les créatures seront rassemblées pour le Jugement final ! "

Sâlih dit :

" A cet instant je me suis réveillé tout effrayé, et je suis resté cloué sur place, plein d'inquiétude, jusqu'à l'aube. Lorsque le jour se leva, je rejoignis la cité, sans autre préoccupation que de trouver la maison de la mère du jeune homme.

En me renseignant, j'y suis arrivé. Je vis la porte peinte en noir, et les lamentations des pleureuses déchiraient le ciel !

Je frappai à la porte, et une vieille femme sortit, et me demanda ce que je voulais. Je lui dis que je voulais parler à la mère du jeune homme mort.

Elle me demanda pourquoi je voulais la voir alors qu'elle était plongée dans son deuil ! Je lui dis : " Envoyez la moi, et dites lui que j'ai un message pour elle de la part de son fils ".

Lorsque la mère du jeune homme apparut, je vis une femme habillée en noir, dont le visage était éteint et sombre à force de pleurer et de se frapper la face !

Je me présentai à elle, et lui racontai mon histoire et ce que j'avais vu de l'état de son fils, et lui transmis son message : " Ô mère ! Tu m'as élevée, et de tous les maux tu m'as préservée ; mais lorsque je suis mort, dans le châtiment tu m'as jeté ! Allah sera juge entre nous, le Jour où le ciel se fondra sur un autre ciel ! "

En entendant cela, elle tomba par terre évanouie, lorsqu'elle s'éveilla, elle pleura abondamment et dit : " Ô mon fils ! Si j'avais su dans quelle situation je t'avais mis, jamais je n'aurais agi ainsi ! Seigneur ! Je me repens et je cesse ! "

Puis elle rentra chez elle, chassa les pleureuses et passa d'autres habits, puis vint me donner une bourse d'argent qu'elle me demanda de distribuer en aumône pour l'âme de son fils.

Sâlih a raconté :

" Je fis ce qu'elle m'a demandé. Lorsque le vendredi suivant arriva, j'allai comme à mon habitude au cimetière, et je m'endormis.

Je vis les occupants des tombes sortir et on leur avait dressé des plats ; j'aperçus le jeune homme parmi eux, tout heureux et joyeux ; un plat qui lui fut présenté à son tour ! Lorsqu'il m'aperçut, il vint auprès de moi et me dit : " Ô Sâlih ! Qu'Allah te récompense en bien, pour ce que tu as fait pour moi ! Allah (Exalté soit-Il) a allégé mes souffrances, lorsque ma mère s'est arrêtée de se lamenter et j'ai reçu les effets de ce que tu as donné comme aumône pour moi ! "

Je lui demandai : " Quels sont ces plats qui vous sont servis ? "

Il me répondit : " Ce sont les présents que les vivants nous font : les aumônes, la lecture du Coran, les invocations, on nous les présente chaque nuit du vendredi ! Va chez ma mère, souhaite lui la paix de ma part et dis lui que je souhaite qu'Allah la récompense en bien, que j'ai reçu ce qu'elle a accompli comme aumône pour moi, et que bientôt elle va me rejoindre : qu'elle se prépare ! "

Sâlih a dit :

" Je me suis réveillé ensuite. Quelques jours plus tard, je suis allé à la maison du jeune homme, et je vis un convoi funéraire qui en sortait.

J'ai demandé qui c'était. On m'a informé qu'il s'agissait de la mère du jeune homme.

J'ai assisté alors à la prière funéraire puis à l'enterrement. Elle fut enterrée à côté de son fils. J'ai invoqué Allah pour eux, et je me suis éloigné ".