Sourate 105 Al-Fil

A l'approche de la région de Tâïf, ses habitants, membres de la tribu des Thaqîf, sortirent à la rencontre d'Abraha dans l'espoir de l'amadouer afin qu'il épargne leur lieu de culte qu'ils appelaient Al-Lât.

Abraha les traita donc avec égards et ils mirent à son service un guide du nom d'Abu Righâl.

Parvenus à Al-Mughammas, un lieu près de la Mecque, ils campèrent. Des incursions furent alors menées contre les troupeaux de chameaux et les bestiaux des Mecquois. Parmi les animaux capturés, se trouvaient deux cents chameaux appartenant à Abd Al-Muttalib le grand du Prophète (Salla Allah 'alayhi wa sallam). Le chef de ces incursions ordonnées par Abraha était le commandant de l'avant garde de l'armée d'Abraha nommé Al-Aswad Ibn Maqsud.

Ensuite, Abraha envoya à la Mecque un émissaire, du nom de Hunâtah Al-Himyari, en le chargeant de revenir avec le plus grand notable de Quraych et de l'informer qu'il n'était pas venu pour les combattre à moins qu'ils ne tentent de lui barrer la route de la Maison sacrée.

Une fois dans la cité mecquoise, Hunâtah fut orienté vers Abd Al-Muttalib Ibn Hâchim auquel il transmit le message d'Abraha. Abd Al-Muttalib répondit : " Par Allah ! Nous n'avons ni la volonté, ni la capacité de le combattre. Ceci est la Maison sacrée d'Allah construite par Son ami intime, Abrâham. Si Allah veut l'empêcher de la détruire, elle est Sa Maison et Son sanctuaire sacré. Mais, si Allah lui laisse la voie libre jusqu'à elle, par Allah, nous n'avons aucun moyen de le repousser ". Hunâtah lui proposa alors : " Viens, allons le voir ". Abd Al-Muttalib accepta.

Quand Abraha le vit, il fut impressionné par lui, car Abd Al-Muttalib était un homme imposant et élégant.

Abraha descendit alors de son trône et s'assit près de lui sur le tapis. Puis, il ordonna à son interprète de lui demander ce qu'il voulait. Abd Al-Muttalib répondit : " Je veux que le roi me restitue mes deux cents chameaux dont il s'est emparé ".

Abraha ordonna alors à l'interprète de lui dire : " Tu m'as plu lorsque je t'ai vu, mais après t'avoir entendu, je n'ai plus pour toi que du mépris. Tu me parles de deux cents chameaux qui t'ont été enlevés et tu ne mentionnes même pas la Maison que je suis venu détruire, et qui pourtant constitue le fondement de ta religion, celle de tes ancêtres ? "

Abd Al-Muttalib lui dit : " Je suis le maître de ces chameaux. Quant à la Maison, elle a un Maître qui saura la défendre ".

Abraha répliqua : " Rien ni personne ne pourra s'opposer à moi ". Abd Al-Muttalib répondit : " Alors vas y ".

Il est rapporté qu'un certain nombre de chefs des tribus arabes accompagnèrent Abd Al-Muttalib et offrirent à Abraha le tiers des biens de la région de Tihâma s'il renonçait à son projet, mais il refusa.

Cependant, il restitua ses chameaux à Abd Al-Muttalib. Ce dernier regagna la Mecque et ordonna aux gens de Quraych de quitter la ville et de se réfugier au sommet des montagnes pour éviter les exactions de l'armée d'Abraha.

Accompagné d'autres hommes de Quraych, il s'accrocha à l'anneau de la porte de la Ka'ba, invoquant Allah et implorant Son secours contre Abraha et son armée.

Dans cette attitude, Abd Al-Muttalib déclama ces vers :

Ô Allah ! L'homme défend certes sa demeure, alors défends Ta Maison.

Que demain matin leur croix et leur ruse, de Ta puissance, n'aient point raison.

Ibn Is'hâq relate que Abd Al-Muttalib remit l'anneau de la porte en place puis lui et ceux des hommes qui l'accompagnaient allèrent eux aussi se refugier au sommet des montagnes.

Muqâtil Ibn Sulaymân affirme qu'avant de quitter les lieux, ils abandonnèrent cent chameaux portant des guirlandes [servant à marquer les bêtes destinées au sacrifice] près de la Ka'ba dans l'espoir que les soldats s'en emparent de façon illicite et soient alors punis par Allah.

Au matin, Abraha se prépara à investir la Mecque en disposant ses troupes en ordre de bataille.

De même, l'éléphant, surnommé Mahmud, fut apprêté pour le combat.

Mais, lorsqu'ils voulèrent orienter l'animal vers la Mecque, Nufayl Ibn Habîb se plaça à côté de lui et, tenant son oreille, il lui souffla : " Mets toi à genoux Mahmud ou retourne directement d'où tu viens, car tu es dans la cité sacrée d'Allah ". Puis, il relâcha l'oreille de l'éléphant qui s'agenouilla effectivement.

Nufayl se mit alors à courir jusqu'à atteindre la montagne qu'il escalada.

Les hommes d'Abraha se mirent à battre l'éléphant pour qu'il se lève, mais en vain. Ils le frappèrent à la tête avec des haches et enfoncèrent des bâtons à crochets dans son ventre au point de le faire saigner, mais il refusa de se lever.

Puis, ils l'orientèrent vers le Yémen. Il se releva alors et avança en pressant le pas. Ensuite, vers le Nord [Cham] puis vers l'Est, il fit de même, mais quand ils l'orientèrent vers la Mecque, il s'agenouilla de nouveau.

Allah envoya alors contre eux une nuée d'oiseaux identiques aux hirondelles et aux hérons, venant de la mer et portant chacun trois pierres de la taille d'un pois chiche ou d'une lentille : une dans le bec et une chaque patte.

Tous ceux qui étaient atteints par ces pierres périssaient. Mais tous ne furent pas atteints. Certains prirent la fuite, courant dans tous les sens à la recherche de leur route et de Nufayl dans l'espoir qu'il leur indique le chemin du retour.

Or, ce dernier se trouvait sur la montagne en compagnie des gens de Quraych et des Arabes du Hijâz, en train d'observer le châtiment qu'Allah infligeait aux gens de l'éléphant.

Nufayl se mit alors à déclamer ces vers :

Où fuir lorsque le poursuivant n'est autre qu'Allah ?

Abraha, au nez mutilé, est vaincu et n'est pas victorieux.